Transarmement
La défense civile non-violente peut être considérée
comme une alternative aux défenses militaires. Mais cela présuppose qu’un
pays décide de renoncer à toute forme de défense armée pour ne faire reposer
sa sécurité, son indépendance et sa liberté que sur la préparation et, le
cas échéant, sur la mise en œuvre de la stratégie de l’action
non-violente. Compte tenu de l’ampleur des changements culturels et politiques
que ce choix implique nécessairement, une telle hypothèse ne peut être
envisagée ni à court ni à moyen terme. En outre, il est assez vain de se
demander si elle peut être envisagée à long terme, puisque les conditions
concrètes dans lesquelles elle pourrait prévaloir échappent aujourd’hui à
notre appréhension.
La valeur d’une alternative se juge aussi à sa
capacité à rendre possible un processus cohérent de transition et une
dynamique de changement. Le concept de « transarmement » semble le
mieux approprié pour désigner ce processus. Il exprime l’idée d’une transition
au cours de laquelle doivent être préparés les moyens d’une défense civile
non-violente qui apportent des garanties analogues aux moyens militaires sans
comporter les mêmes risques. La notion de transarmement exprime également
l’idée d’une transformation des moyens de défense. Alors que le mot
« désarmement » n’exprime qu’un rejet, celui de « transarmement »
veut traduire un projet. Alors que le désarmement évoque une perspective négative,
le transarmement suggère une démarche constructive. Avant de pouvoir désarmer,
il faut pouvoir fourbir d’autres armes que celles de la violence. Pour autant,
les concepts de transarmement et de désarmement ne sont pas antagonistes, car
l’une des finalités du processus de transarmement est de rendre possibles des
mesures effectives de désarmement. Le désarmement est l’aspect négatif du
transarmement. Son aspect positif est constitué par un programme constructif
qui permette à la société de gérer et de maîtriser ses conflits internes et
externes selon les principes et les méthodes de la stratégie de l’action
non-violente.
Avant que la défense civile non-violente puisse être
considérée par la majorité de la population et par les pouvoirs publics comme
une alternative fonctionnelle à la défense armée, la première tâche est
d’établir sa faisabilité et de lui faire acquérir une réelle crédibilité.
Dans ce processus de transarmement, il s’agira de préparer et d’organiser
la défense civile alors que, dans le même temps, une défense militaire sera
maintenue. Les différentes formes de défense militaire et la défense civile
devront donc coexister, même si cette coexistence peut apparaître
conflictuelle. La mise en œuvre d’une défense civile constituerait une
valeur ajoutée à la défense globale du pays. Tout ce qui renforce
l’affirmation de la volonté de défense des citoyens et tout ce qui augmente
leur capacité dé résister contre une éventuelle agression prolonge et
amplifie l’effet dissuasif de la défense du pays.
Si l’on envisage des scénarios concrets de défense
contre une agression effective, après le contournement de la dissuasion globale
d’un pays, trois hypothèses sont théoriquement possibles : la défense
civile non-violente peut être considérée, par rapport aux différentes formes
de défense militaire, comme un complément, un recours ou une option.
- Le
complément.
Dans cette hypothèse, la défense civile serait mise en œuvre en même
temps que la défense militaire. Mais cette complémentarité ne peut être
envisagée de manière symétrique. Dans une résistance globalement
non-violente, des actions armées ponctuelles seraient peu opportunes et même
contreproductives. Elles viendraient contrarier l’efficacité de la résistance
non-violente. Celle-ci a sa dynamique propre qui ne peut être pleinement
efficiente que si elle est seule à s’exercer. En revanche, si la résistance
est essentiellement militaire, l’adjonction de formes de résistance
non-violente – tout particulièrement d’actions de non-coopération avec
l’agresseur – ne pourrait que renforcer l’efficacité globale de la résistance.
- Le
recours.
La défense civile serait alors mise en œuvre après l’échec ou du moins
l’arrêt de la défense militaire. Ce scénario est évidemment très défavorable.
Cependant, en toute hypothèse, la résistance civile serait alors la seule
possibilité de faire émerger au sein de la population une nouvelle volonté
de lutte avec l’espoir que « tout n’est pas perdu ».
- L’option.
La mise en œuvre de la défense civile serait alors choisie à la place de
la défense militaire. Après l’échec de la dissuasion globale, il apparaîtrait
aux décideurs politiques que tout emploi des armes serait vain, voire
suicidaire. Dès lors que la stratégie de l’action militaire s’avérerait
non opérationnelle et donc non souhaitable, la sagesse politique
commanderait d’y renoncer afin de donner les plus grandes chances de succès
à la défense non-violente. Compte tenu de la puissance destructrice des
armements modernes, cette option serait probablement la plus raisonnable
pour permettre à une société de se défendre sans se détruire.
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