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Contrainte

 L’action non-violente constitue un pari sur la capacité des hommes à devenir raisonnables. À l’intérieur même du conflit, elle entreprend de raisonner l’adversaire en voulant le convaincre de la justesse de la cause défendue. Mais cette « conversion » de l’adversaire constitue pour la lutte non-violente davantage une visée qu’un objectif. L’objectif immédiat est de contraindre l’adversaire sans attendre qu’il se laisse convaincre.

Le combat non-violent ne peut se limiter à un débat d’idées où il s’agirait de convaincre notre adversaire de la justesse de notre cause. Ce serait méconnaître la réalité politique que de vouloir réduire l’action non-violente à un dialogue rationnel où la vérité pourrait triompher de l’erreur par l’exposé d’une démonstration qu’aucune objection ne pourrait venir contredire. En réalité, le dialogue social et politique ne s’inscrit pas sur le registre de la communication rationnelle où seuls les concepts et les idées rivaliseraient entre eux. Bien souvent, les mots eux-mêmes ne mettent pas tant en cause des idées que des intérêts. C’est pourquoi leur force de persuasion se trouve fortement atténuée.

Les rapports sociaux et politiques, aussi bien entre les individus qu’entre les groupes, sont des rapports de pouvoir et reposent sur des rapports de force. Et face à des enjeux de pouvoir qui mettent en cause des intérêts antagonistes, les hommes, généralement, ne se conduisent pas raisonnablement. Pour qu’ils le fassent, il n’est pas suffisant de faire appel à leur raison. La simple exigence de justice, face à celui qui profite de l’injustice, risque fort de l’indisposer plutôt que de le disposer au dialogue et à la conciliation. Dans un premier temps, la revendication de justice est beaucoup plus de nature à rompre le dialogue qu’à l’instaurer. Lorsque l’esclave exige sa liberté, il rompt délibérément le dialogue que sa résignation lui permettait d’entretenir avec son maître. Et il est rare que celui-ci se laisse aussitôt convaincre par la justesse de la revendication qui lui est présentée et accepte d’emblée de la satisfaire. Avant que ne s’instaure un nouveau dialogue d’égal à égal entre les deux hommes – si jamais il peut s’instaurer – beaucoup de temps sera nécessaire.

On ne saurait donc faire valoir la force de la non-violence en prétendant que la vérité est universelle et que l’adversaire ne peut donc refuser de la voir et de la reconnaître. Déjà, dans les conflits entre deux personnes, il serait largement imprudent d’affirmer que l’un des adversaires se rendra sûrement à la vérité, pourvu que l’autre sache lui-même la respecter avec détermination et persévérance. En ce domaine, rien n’est inéluctable. Il n’existe aucun déterminisme, fondé sur « la force de la vérité », qui obligerait quiconque à se rendre aux raisons de celui qui défend une cause juste. Mais, surtout, au niveau des conflits sociaux et politiques, les adversaires ne sont pas des personnes, ni même des groupes de personnes, mais des groupes d’intérêts. Généralement, de tels groupes ne se laissent pas « convaincre ». L’action non-violente ne peut avoir d’autre but que de les contraindre.

Certes, parmi les membres de ces groupes, certains individus pourront être sensibles à la justesse de la cause défendue par l’adversaire. Ils pourront alors en devenir en quelque sorte les avocats auprès de leurs partenaires. Mais, vraisemblablement, du moins dans un premier temps, ils ne seront qu’une petite minorité et courront le risque d’être repoussés dans la marginalité par leur propre groupe qui les considérera comme des « traîtres ». Leur rôle cependant pourra être important, voire décisif, lorsque, la lutte ayant changé le rapport de force, le moment viendra de rechercher une solution négociée du conflit.

Ainsi l’expérience ne nous permet pas d’espérer que la seule « force de la justice » puisse convaincre un groupe social qu’il doit renoncer de lui-même à ses privilèges et reconnaître le bien-fondé des exigences qui lui sont présentées. Lorsqu’il s’agit de lutter contre les injustices structurelles du désordre établi, c’est la contrainte exercée par l’action collective, tout particulièrement par des actions de non-collaboration, d’intervention et de confrontation, qui est déterminante dans le succès d’une stratégie de l’action non-violente. L’adversaire s’estimera contraint d’accepter de négocier lorsque la poursuite de la lutte lui rapporterait davantage de coûts que de bénéfices et serait ainsi contraire à ses intérêts.

 

Dialogue

Force

Non-coopération  

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