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Autorité

Il convient d’emblée d’établir et de maintenir une distinction entre l’autorité et le pouvoir. Ce qui caractérise l’autorité, que ce soit celle d’une personne ou d’une institution, c’est qu’elle est reconnue par ceux à qui il est demandé de suivre ses conseils et ses instructions. L’obéissance à l’autorité fait l’objet d’un consentement. Ce n’est pas un rapport de force qui relie celui qui possède l’autorité à celui qui lui est assujetti, mais une relation de confiance. La parole même de celui qui est responsable « fait autorité ». Dès lors, aucun moyen de contrainte ne lui est nécessaire pour être respectée. Cependant, l’autorité ne présuppose pas un rapport d’égalité entre celui qui la détient et celui qui lui est subordonné. Par sa nature, l’autorité implique une hiérarchie. L’équation personnelle de celui qui possède l’autorité est plus importante que la fonction au nom de laquelle il l’exerce. On parle de « l’autorité morale » d’un homme qui peut exercer ou non une fonction de pouvoir, mais dont le savoir, la compétence, l’expérience, l’intégrité, l’honnêteté, la sagesse inspirent le respect. Ce qui constitue la force de l’autorité, c’est qu’elle veut toujours être juste. Celui qui l’exerce la perd dès qu’il s’écarte des chemins de la justice.

L’autorité respecte la liberté de ceux envers lesquels elle s’exerce. Le sujet qui reconnaît l’autorité d’une personne n’est pas dans l’obligation d’obéir. Il garde la liberté de prendre la responsabilité de passer outre. L’autorité donne un avis, un conseil, plutôt qu’un ordre. Elle fait une recommandation, elle n’édicte pas un commandement. L’autoritarisme est un dévoiement de l’autorité. Ainsi, lorsqu’il est malade, l’individu vient se placer lui-même sous l’autorité du médecin, mais il a le choix de suivre ou de ne pas suivre ses ordonnances ; s’il décide de passer outre, il le fait à ses risques et périls.

Dans un autre registre, l’autorité dont est pourvu le sage, aussi forte soit-elle, ne lui donne aucun pouvoir et nul ne peut être contraint et forcé de suivre ses conseils. De même, l’autorité du leader non-violent, lorsqu’il a la responsabilité principale de conduire une action, lui vient du respect qu’il inspire et il ne détient aucun pouvoir de coercition. Le chef militaire peut posséder une réelle autorité, mais, si celle-ci lui fait défaut, il a toujours le pouvoir de se faire obéir par de multiples moyens de contrainte.

Celui qui a la responsabilité d’exercer un pouvoir – cela est déjà vrai du parent et du maître d’école –, doit, quant à lui, se faire obéir. Il doit s’efforcer de « faire preuve d’autorité », c’est-à-dire d’obtenir le consentement de ceux auxquels il adresse ses ordres. Mais s’il ne parvient pas à convaincre, il lui faut alors recourir à une contrainte, sans que cela signifie qu’il doive user des moyens de la violence. Pour celui qui détient le pouvoir, le recours à la violence est un aveu de faiblesse. Et la violence lui fait perdre son autorité. L’autorité est essentiellement non-violente. D’une part, la violence est incapable de créer l’autorité et, d’autre part, c’est lorsque le pouvoir se trouve dépourvu d’autorité qu’il lui faut recourir à la violence. C’est donc s’enfermer dans la plus grande confusion que d’identifier le recours à la violence comme l’exercice normal du pouvoir. Certes, la violence peut se faire obéir, mais elle ne peut pas être un substitut à l’autorité. Elle en est toujours la négation.

 

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