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Humour
Le mot « humour » est dérivé de « humeur » qui
vient du latin humor qui désigne un élément liquide. Humeur a
d’abord désigné un liquide organique du corps humain et ensuite le caractère
car, autrefois, on faisait dépendre celui-ci de la composition des « humeurs »
(pricipalement le sang, la bile, l’atrabile et le flegme). Humeur eut alors
deux emplois antinomiques, tantôt signifiant la « disposition à la
plaisanterie » (la bonne humeur), tantôt la « disposition à
l’irritation » (la mauvaise humeur). L’anglais humour a repris
au français le premier de ces sens, et il est revenu s’intégrer comme tel à
la langue française. D’une déconvenue, la sagesse des nations dit qu’« il vaut mieux
en rire qu’en pleurer ». Et elle dit vrai. Adopter une attitude
d’humour face aux événements, c’est se trouver dans une situation où tout
devrait concourir à disposer à l’irritation et renverser le cours normal des
choses en décidant de recourir à la plaisanterie. L’humour est une méthode
de résistance contre l’adversité ; c’est un moyen de se défendre
contre le déplaisir. Pratiquer l’humour, c’est démentir la réalité.
L’humour est un exorcisme. Au vu des circonstances, l’homme d’humour
devrait être de mauvaise humeur et il décide d’être de bonne humeur. Face
aux difficultés de sa vie, il est déterminé à ne pas être d’humeur noire,
à ne pas se faire de mauvais sang ni de bile, mais, au contraire, à garder son
sang froid, à ne pas perdre son flegme et à faire contre mauvaise fortune bon
cœur. L’humour est un regard souriant porté sur soi-même, sur les autres et
sur le monde. Ce n’est pas par défaut de langage que l’on dit de l’homme
d’humour qu’il est « spirituel ». Car l’humour est une vertu.
Le reproche de « ne pas avoir le sens de l’humour » montre bien
que le manque d’humour est un défaut. En permettant à l’individu de se défendre contre l’irritation, la
peur, le ressentiment et la colère, l’humour lui offre la possibilité de se
protéger contre la haine et la violence. Par ailleurs, l’humour possède en
lui-même une formidable force de contagion, un immense pouvoir de conviction.
Le spectateur-auditeur qui regarde et entend l’humoriste se trouve disposé à
le suivre dans la voie qu’il a empruntée et répond volontiers à
l’invitation qui lui est faite à venir partager son plaisir humoristique. L’humour peut également être pratiqué non plus envers soi-même mais
envers les autres. S’il est emprunt de bienveillance, les autres peuvent alors
rire volontiers d’eux-mêmes. Mais s’il devient ironie, celle-ci risque de
ne pas les faire rire du tout. Ainsi l’humour peut se gauchir et se
transformer en une moquerie qui blesse celui se trouve visé. Il peut céder la
place à la dérision qui est mépris et méchanceté, et donc violence. Lors des manifestations publiques non-violentes, il est particulièrement
opportun de s’exprimer en recourant à la force de l’humour. Par lui-même,
l’humour est une force de résistance, un défi lancé à l’adversaire qui
risque de se trouver dépourvu pour y faire face. L’humour vient prendre à
contre-pied ses meilleurs arguments. L’humour est désarmant. L’humour est
redoutable en cela qu’il est une contestation radicale de l’autorité des
puissants. Par ailleurs, l’humour peut devenir un atout majeur dans la bataille de
l’opinion publique. L’humour est susceptible de susciter parmi le public une
réaction amusée de sympathie et une attitude de bienveillance à l’égard
des acteurs et de l’action. Il est toujours bon de « mettre les rieurs
de son côté ». Et en provoquant le rire, on facilite par là-même
l’adhésion. Un mot qui fait sourire peut être plus convaincant qu’une
longue argumentation qui veut faire réfléchir. Mais, là encore, il convient
d’éviter la dérision qui s’apparenterait à un mépris de l’adversaire. Parole
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